Semaine du 17 au 23 Septembre

Frédéric travaille pour un client de Keyrus, cela lui donne une première impression de la façon de travailler des québécois.

Expérience de  travail

Comme entrée en matière on m'a mis dans un bureau avec 3 secrétaires comptables. Le premier souci est qu'une de mes voisines écoute une radio populaire toute la journée, cette radio diffuse en cycle continu une vingtaine de chansons d'amour chantées par des hidalgos à voix chevrotantes; en début d'après midi j'ai droit à des débats du type: "est ce que la vieillesse est ressentie plus durement par les femmes que par les hommes?" ou bien "Comment expliquer les choses du sexe aux enfants?" Les conversations croisées sont elles aussi très intéressantes, on parle des achats , des visites chez le médecin, des problèmes de santé des personnes de l'entreprise; je n'en perd pas une miette,  ce qui est très amusant est que j'y entend la pure "parlure québécoise", je me rend bien compte que quand les gens s'adressent à moi ils "normalisent" leur manière de parler . Elles n'arrêtent de dire "je vais canceller ce paiement !";  on se préoccupe 10 minutes avant la fin du service (16h30) de ce que l'on va faire pendant les 10 dernières minutes. Tout le monde s'en va à 4h30 pile; c'est pratique, cela me donne des repères.

A midi l'équipe avec laquelle je travaille m'invite à prendre le repas  et là j'ai droit aux conversations des mâles (informatique oblige); j'ai plus de difficultés à suivre les conversations des mâles parce que certains ont des accents très prononcés. D'autre part quand les blagues fusent il y a  souvent un paquet de mots que je ne comprends pas, sont ce des mots grivois ? Une grande préoccupation des mâles est : qui va participer au prochain match de l'équipe de Hockey ? En fait une partie des mâles de la société affronte de façon hebdomadaire une autre partie des mâles de la société.

 

Ca prends une voiture.

On utilise beaucoup l'expression "Ca prend" au lieu de "cela demande", effectivement le lieu de travail n'est pas vraiment près de chez moi. J'avais cru dans un premier temps que le fait que cela soit sur l'île  de Montréal me garantirai un trajet assez rapide; et bien point du tout, en fait l'île de Montréal est vraiment énorme et certains quartiers , dont Pointe Claire , ne sont pas très bien desservis. Mon chargé de projet m'a donné un itinéraire en supposant que j'avais une voiture. Quand je lui ai dit que je suis venu en transports en communs il m'a regardé comme un martien , en fait je n'ai pas rencontré d'autre personne qui vienne dans cette entreprise sans sa voiture personnelle. Il faut dire que dans ce quartier rien n'a été pensé pour le piéton ; on voit une alternance d'immenses halls commerciaux qui font souvent pas loin de 300 mètres avec le parking , de sites industriels et de résidences d'habitations. Il y a milieu du quartier des immenses artères parfois infranchissables, beaucoup de voies n'ont pas de passages protégés pour les piétons. Le plus désappointant pour le piéton est qu'il n'y a pas du tout de trottoir, en fait on marche sur qui entoure les sites commerciaux et industriels. De fait le piéton est un paria, il n'a pas sa place, je n'ose pas même imaginer le tableau en hiver, cela doit tout simplement être sucidaire de vouloir persévérer à être piéton. Nous sommes allés avec Hortense faire un practice de golf, et on a appelé le centre pour savoir comment se rendre en transports , le résultat est que l'on nous a passé le poste de 4 personnes avant  d'avoir les indications. Comme me rappelle très justement mon ami Bruno : "N'oublie pas que tu es en Amérique du Nord, le monde de la voiture."

Transports en commun.

Le métro est superbe et moderne (une trentaine d'années), ses halls sont très spacieux, comme la ville a été tracée suivant un plan rectiligne il est rapide; pour ne rien gâcher il est  propre et l'on ne s'y fait pas embêter par les quêteurs. Est ce que les gens y font moins la gueule qu'à Paris? Sans doute un peu moins, surtout qu'il n'arrive jamais que l'on se retrouve tassés comme des sardines.  On voit beaucoup de personnes lire des journaux gratuits, certaines boivent leur café dans une tasse recouverte d'un capot de plastique. En fait le vrai goût du transport en commun , on l'a dans le bus. C'est beaucoup moins sympa de prendre le bus. Pour commencer il faut l'attendre ce putain de bus, j'ai attendu le bus sous la pluie, en fait les gens s'en arrangent bien , ils se mettent bien sagement en ligne devant l'arrêt, moi évidemment je me suis abrité. En plus pour aller à mon travail, je dois prendre une correspondance  de bus ! parfois cela me fait un trajet total de 1h 45!  D'aucun dirons que l'on peut en profiter pour lire, mais on se trompe; en fait les rues sont défoncés et les soubresauts résultant vous dissuadent souvent de lire, quand ça n'est pas la radio du chauffeur qui écoute un compte rendu de match de base-ball qui vous dérange. Dans le métro on vous annonce les arrêts, ici dans le bus il n'y a pas de plan, les arrêts ne sont pas nommés, et ce qui n'arrange rien c'est que lorsque l'on est debout, on arrive pas à lire les noms des rues . Le plus difficile à soutenir est sans doute la perte de statut social; dans le métro , la lumière des néons nivellent les classes sociales et la vitesse vous fait sentir dans un vaisseau spatial; dans le bus, tout le monde apparaît donc en plein jour. Je me vois donc, moi consultant en nouvelles technologies, entourés d'étudiants, d'un flux de personnes désœuvrés des dernières vagues d'immigration, et de grosses femmes noires (ici je devrais dire minorité visibles) ; et là je me dis que c'est un peu une idée stupide que d'avoir voulu immigrer, et qu'au moins à Paris j'avais une voiture. Au bout de quelques jours je me suis fait à la contrainte du bus, et paradoxalement cela ne me déplais pas tant que cela, peut être est ce là une forme de masochisme social. J'ai mis mon entreprise au courant de la situation, et elle a jugé inconvenant que je prenne ainsi le bus, et elle m'a envoyé aussitôt une avance sur les frais de taxi, ouf, l'honneur est sauf!